L'association
Moulin Vert a formulé en novembre 2003 un recours contentieux contre
le permis de construire accordé par la Ville de Paris au diocèse
de Paris concernant le programme immobilier prévu au 16 rue du Moulin
Vert, ancien Cours Saint Pierre. L'audience s'est tenue le 30 janvier
2004 au tribunal administratif de Paris. Le commissaire du gouvernement
a prononcé ses conclusions et le tribunal va délibérer au vu de
ces conclusions. En théorie, il s'agit d'une lecture neutre qui
donne la solution en droit. Cependant, le commissaire du gouvernement
n'a fait preuve d'aucune neutralité en employant un ton ironique
dès les premiers mots prononcés et ceci jusqu'à la fin de la lecture
des conclusions. Il en a même fait rire la présidente du tribunal.
L'attitude du commissaire du gouvernement est étonnante et choquante
car malgré la neutralité qui s'impose de droit, il a volontairement
donné un caractère non sérieux à l'affaire. Il a aussi omis de préciser
des faits qui donnaient un sens, une crédibilité et tout son poids
à une véritable affaire de quartier, même si a priori les
motifs juridiques invoqués, comme les imprécisions ou erreurs de
la notice paysagère, ont été insuffisants à vicier le permis de
construire. La co-visibilité avec l'église Saint Pierre de Montrouge
classée et la question fondamentale de l'insertion dans le site
(article 11 du POS) ont été à peine évoquées.
Pourtant,
pendant presque 3 ans, notre affaire a mobilisé tout le quartier
ainsi que le Maire du 14ème, les nombreux articles dans la presse
sur le sujet ainsi que le reportage de la chaîne France 3 diffusé
le mercredi 29 août 2001 en ont témoigné :
- Le
Maire du 14ème arrondissement qui avait émis un avis défavorable
sur ce projet avait saisi le Maire de Paris sur le risque de surdensification
du coeur de cet arrondissement. La rue du Moulin Vert se situe à
proximité du carrefour Alésia/Maine/Général Leclerc/Jean Moulin,
un secteur où la circulation automobile est particulièrement dense.
Avec ses 74 parkings, le projet immobilier ne peut qu'aggraver cette
situation déjà dénoncée à plusieurs reprises par les habitants et
bien connue des pouvoirs publics.
- La
mobilisation des habitants était reconnue contre ce projet de 20m
sur 20m, évidemment massif. Celui-ci doit remplacer la regrettée
cour pittoresque arborée et ses charmants bâtiments d'école. En
créant un vaste écran de béton, ce programme va priver tout un secteur
d'un espace qui offrait à la fois verdure, aération et clarté aux
riverains, aussi bien côté rue que côté cour. Ce site constituait
un " poumon vert ", 6 grands platanes bien développés et donc irremplaçables,
entre les grands axes de circulation et de pollution décrits ci-dessus.
Il va également nuire aux très nombreux habitants en leur faisant
subir désormais un vis-à-vis qui de surcroît dévalorise leurs biens
immobiliers. Les riverains ont donc rejeté un projet architectural
qui ne s'insère pas dans le site bâti actuel constitué de petits
immeubles (en moyenne R+4). L'emprise du projet, R+6 et l'implantation
en retrait, va créer le genre de préjudice que la politique actuelle
de la Ville de Paris et celle du gouvernement ont pour but d'éviter.
En effet, la situation est contradictoire car a priori la
protection du cadre de vie est devenue une préoccupation et une
priorité des pouvoirs publics qui se montrent à l'écoute des habitants
lors des échanges en réunions de concertation PLU ou conseils de
quartier. Le Collectif " 16 rue du Moulin Vert " puis l'association
Moulin Vert ont oeuvré pour dénoncer un projet mal intégré et s'y
opposer, cette démarche s'inscrit donc dans une logique de quartier
portée par les habitants.
-
Les habitants du quartier s'inquiètent également au sujet des conséquences
d'un tel chantier sur les propriétés voisines prévu dans une zone
de carrières. Les démolitions, fouilles en grande masse et la réalisation
du voile périmétral des sous-sols ne manqueront pas de créer les
habituels désordres qui ne peuvent être limités que par des recommandations
particulières faites au constructeur et en fonction de leur bon
suivi.
- La
situation centrale, au coeur de l'arrondissement, et la vaste superficie
du Cours Saint Pierre en faisaient un emplacement idoine voire idéal
pour accueillir la Maison des associations, attendue de longue date
par les habitants du 14ème. D'ailleurs cela devait répondre également
à la nouvelle politique de la Ville de Paris soutenue par la politique
gouvernementale, celle-ci souhaitant doter chaque arrondissement
d'une Maison des associations. Un projet de réhabilitation aurait
pu se réaliser aisément en rénovant les structures existantes. Mais
la Ville de Paris se trouvait dans l'impossibilité de faire jouer
son droit de préemption, comme elle l'annonçait lors d'un Conseil
municipal, l'opération ne donnant pas lieu à vente du terrain mais
à cession de droits à construire au promoteur pour la moitié du
programme. De nombreuses associations se sont regroupées en Collectif
pour réclamer ensemble une Maison des associations et ont manifesté
régulièrement en organisant des petits déjeuners conviviaux devant
le 16 rue du Moulin Vert ainsi que devant la Mairie du 14ème arrondissement.
Malgré
ce contexte, le commissaire du gouvernement a proposé la condamnation
de l'association à verser la somme de 800 euros au diocèse de Paris
(celui-ci avait réclamé la condamnation au versement de 3 000 euros).
Par
ailleurs, le promoteur a effectué quelques tentatives " d'intimidation
" à l'égard de l'association Moulin Vert afin d'obtenir un désistement
de procédure (lettre écrite par le promoteur). En effet, depuis
le dépôt du recours contentieux, le promoteur a montré la volonté
de " négocier " avec la copropriété du 12 rue du Moulin Vert, siège
de l'association Moulin Vert requérante. Donner suite à cette négociation
aurait mis en péril une procédure engagée au nom des intérêts de
tout un quartier au profit des seuls intérêts particuliers de la
copropriété du 12 rue du Moulin Vert. Ceci n'a pas été porté à la
connaissance du tribunal par l'association Moulin Vert qui a ainsi
fait preuve d'intégrité jusqu'au bout de la procédure.
Dans
le cas où le tribunal administratif suivrait les conclusions du
commissaire du gouvernement, l'association Moulin Vert aura besoin
du soutien financier des habitants : 1 euro par personne suffira
si nous sommes 800 à contribuer au versement des 800 euros au diocèse
de Paris.
Morale de cette histoire : le Cours Saint Pierre
est devenu la cour des grands dans laquelle nous avons osé venir
jouer... que le diocèse fasse bon usage des euros qui lui seront
versés...
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